Marie Ranvier

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Univers des Arts - Automne 2020 numéro 200


Univers des Arts - automne 2020 numéro 200 Univers des Arts - automne 2020 numéro 200



Une artiste de l’enfance comme équilibre fragile


Il est des artistes qui nous parlent d’emblée et Marie Ranvier en est une ...
Marie est artiste depuis toujours, depuis l’enfance. On sent lorsque l’on prend le temps de parcourir ses nombreuses œuvres que l’enfance est omniprésente et de façon multiple.
On perçoit alors que pour Marie, l’enfance est un enjeu de taille et que l’art est de faire émerger en nous, comme en elle, cet enfant que nous fûmes.


Cet enfant qui découvre la vulnérabilité de toute existence, enfant en équilibre à la recherche d’un lieu propre. Marie, nous parle de ce temps, de l’enfance et elle le fait avec toute la singularité de son art.
Son art qui explore les couleurs premières, celles précisément de l’enfance, le bleu, le rouge, le blanc, le vert, parfois s’y mêle un gris ou un aubergine comme pour ponctuer ce regard enfantin des larmes de l’adulte.
Marie parcoure littéralement, et comme nul autre, la fragilité de l’enfance, l’imaginaire au cœur, d’un espace coloré et traversé de liens, de mailles, de cercles, de branches, de nervures ...
Souvent l’espace ouvert et erratique inclut un autre lieu, clos. Une sphère, une forme, un îlot comme pour offrir à l’enfant qui parcoure la toile, un refuge ou une matrice.
L’enfant chez Marie a besoin d’un point fixe pour pouvoir explorer le monde, pour pouvoir arpenter la vie.


L’enfant a besoin de s’accrocher, de se lier, de se suspendre à quelque chose pour entrer dans la vie et les toiles de Marie en sont des témoignages poétiques. Les tableaux de Marie sont ceux d’une poétique du lien et de l’îlot.
Il y a aussi au fil des toiles de Marie, une musique ténue. Une musique douce et nostalgique.


Une musique lointaine et pleine d‘espoir. L’espoir de l’enfant, celle qui nourrit sa confiance et son amour de la découverte. Si vous prenez le temps, oui le temps ! Le temps de sonder et méditer la peinture de Marie, vous percevrez l’enfant et sa quête émerger en vous. Vous vous souviendrez de vos premiers pas, de vos premiers émois, de vos premières peurs mêlées d’excitation face au monde qui s’offrait alors à votre regard, votre regard enfantin et joueur.
Marie nous parle de loin, de l’enfantin en chacun de nous, de ce point aveugle et souvent oublié, ce point fondamental qui fait de nous les adultes que nous osons être.


Caroline Guth - Février 2018



Revue UNIVERS DES ARTS - n° 130 Avril 2008


Jardin bleu 1
Jardin bleu 1 - 24 x 19 - Acrylique sur toile

Depuis sa première apparition au Salon d’Automne en 1987, Marie Ranvier a poursuivi sa carrière de peintre avec une créativité et une persévérance remarquables.

Je l’avais découverte en 1991 à la Galerie Artès et ses peintures m’avaient séduit. Que ce soit ses femmes, ses jardins, ses fleurs, tout chez elle renvoie à un sentiment intemporel de paix et de tranquillité. Tranquillité peut-être parfois teintée de tristesse ou de mélancolie, mais sentiment d’apaisement.


Je pense à ce Haïku de Seishi

En plein jour j’ai vu

Une fourmi

Elle me hante cette nuit

Et encore

Comme si elle était mon âme

Elle s’épanouit, la fleur de magnolia

Je me sens mieux

(Kabata Bôsha)

A vrai dire, il n’y a pas beaucoup plus à dire, que cette invitation à la contemplation des œuvres d’une artiste dont la technique du pointillisme actuelle traduit à merveille la sensibilité. Les illustrations qu’on peut présenter ne donnent qu’une idée imparfaite de son talent.


Patrice JOSSET



Revue UNIVERS DES ARTS - Octobre 2000


Maternité aux cheveux fuschia
Maternité aux cheveux fuschia - 100 x 65 - Acrylique sur toile
Le vitrail
Le vitrail - 92 x 73 - Acrylique sur toile

Il y a chez Marie Ranvier un goût très prononcé pour la rigueur, toujours tempéré par une tendresse et une poésie extrêmes. Cette rigueur se traduit presque constamment par la présence d’un cadre à l’intérieur du tableau lui-même, cadre où le personnage figuré se trouve soit enfermé soit en voie de s’échapper. Parfois le cadre est à l’extérieur du personnage, fenêtre, vitrail, élément de la décoration, mais sa structure géométrique apparaît particulièrement importante dans le décor très dépouillé de ses tableaux.


Cette référence à une forme géométrique et particulièrement au carré invite à en faire une interprétation symbolique. Le carré est dans presque toutes les civilisations l’image de la terre, terre de laquelle nous naissons comme Adama, le premier homme issu de la terre rouge, au premier jour et à laquelle nous retournons, telle la poussière. Mais aussi la terre nourricière porteuse de toutes les abondances. Il n’est pas sans signification, me semble-t-il, que Marie RANVIER représente conjointement la femme et la terre. C'est-à-dire finalement deux figures symboliques donnant la vie et d’une générosité sans limite.


Le tableau « Maternité aux cheveux fuschias » le confirme encore s’il en était besoin, puisque là la femme est dans l’acte de gestation de la vie, alors que dans « Le vitrail » la gestation est toute de nature spirituelle.


La vie donne la vie, et la renaissance est toujours possible pour celui qui en a le désir profond. Cette préoccupation profonde est certainement une des raisons majeures qui attire l’œil du spectateur vers ses tableaux, parce qu’elle y exprime quelque chose d’universel.


Patrice JOSSET



Revue UNIVERS DES ARTS - n° spécial Novembre 1995

La sensualité dans l’art et les artistes femmes d’aujourd’hui


Enfermement et libération


Cyclamen
Cyclamen - 80 x 40 - Acrylique sur toile
La main tendue
La main tendue - 80 x 40 - Acrylique sur toile
Portrait au vase
Portrait au vase - 81 x 54 - Acrylique sur toile

Enfermement – libération – la peinture de Marie Ranvier est à l’image de l’éternel combat de la vie. Ici l’enfermement souvent immatériel, psychique, sentimental, symbolique est représenté matériellement.


Le cadre du tableau se double d’une boîte qui enferme le personnage, et dans lequel il s’installe comme il peut.


Cet enfermement est présent d’un bout à l’autre de notre vie ; enfermés, nous le sommes dans le ventre de notre mère, avant la naissance qui nous libère momentanément, mais aussi dans le cercueil ou dans l’urne sur laquelle se refermera la terre-mère, avant une éventuelle renaissance.


Les tableaux de MR nous renvoient encore plus clairement à l’enfermement de la vie quotidienne, au sein d’un monde de pseudo-communication.


Pourtant rien n’est joué, tout espoir n’est pas perdu, plusieurs éléments en sont le symbole évident. Les fleurs de Marie Ranvier adjoint aux personnages sont des clés, non seulement des intentions, inconscientes peut-être de l’artiste mais aussi du sens caché de ce message. La plante, qu’elle soit dans son pot ou enracinée dans la terre est apparemment immobile, mais sa beauté et son existence lui suffisent à elle-même. « La rose est sans pourquoi » comme disait le mystique allemand Angelus Silesius. Le message est clair pour nous, arrêtons de nous poser de mauvaises questions pour vivre.


Patrice JOSSET